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Y A-T-IL UNE RELATION ENTRE MANQUE DE SOMMEIL ET MALADIES NEURODEGENERA-TIVES ?

Y A-T-IL UNE RELATION ENTRE MANQUE DE SOMMEIL ET MALADIES NEURODEGENERA-TIVES ?

Y a-t-il une relation entre manque de sommeil et maladies neurodégénératives ?

Le manque de sommeil chronique est un problème de santé publique croissant dans nos sociétés modernes, notamment en raison de l'omniprésence des écrans et d'un rythme de vie de plus en plus stressant. Près de 30% des adultes dormiraient moins de 6 heures par nuit selon une enquête récente de l'INSV menée auprès de 2500 français (Roussel, 2022). Or, de nombreuses études scientifiques suggèrent que la privation régulière de sommeil pourrait être un facteur de risque de développer certaines maladies neurodégénératives invalidantes telles qu’Alzheimer ou Parkinson. Explications détaillées.

Le manque de sommeil, facteur de risque avéré des maladies neurodégénératives

Plusieurs grandes études observationnelles prospectives rigoureusement menées ont montré une association entre la quantité habituelle de sommeil auto-rapportée et le risque de développer une démence ou la maladie d’Alzheimer des années plus tard.

Par exemple, une méta-analyse de 2018 regroupant 8 études prospectives de cohorte portant au total sur près de 100 000 participants âgés de 46 à 102 ans suivis pendant 6 à 25 ans, a observé que les adultes dormant en moyenne moins de 6 heures par nuit avaient un risque accru de 30% de développer une démence toutes causes confondues au cours du suivi comparé à ceux dormant 7 heures par nuit (Bubu et al., 2018). Le suivi prolongé et l'ampleur de l'échantillon confèrent une robustesse certaine à ce résultat.

De même, une autre étude observationnelle américaine de grande ampleur portant sur près de 15 000 personnes âgées de plus de 65 ans suivies pendant 12 ans a révélé que celles dormant 5 heures ou moins par nuit avaient un risque augmenté de 85% de développer la maladie d'Alzheimer spécifiquement, après ajustement sur les autres facteurs de risque (Sterniczuk et al., 2020). Là encore, la durée du suivi et la taille de l'échantillon renforcent la validité de l'association statistique retrouvée.

Bien que ne permettant pas d'établir un lien de causalité direct, ces études prospectives rigoureuses et de haute significativité statistique jettent un sérieux doute sur l'innocuité d'une dette chronique de sommeil, et suggèrent fortement que celle-ci pourrait être un facteur de risque modifiable majeur des démences, notamment de la maladie d’Alzheimer.

Des résultats similaires ont été retrouvés concernant le risque de maladie de Parkinson. Ainsi, une étude observationnelle américaine de très grande envergure portant sur près de 8000 participants suivis prospectivement pendant 50 ans a révélé que ceux dormant en moyenne 5 heures ou moins par nuit avaient un risque multiplié par 2 à 3 de développer la maladie de Parkinson au cours du suivi, comparativement à ceux dormant 7 heures par nuit (Abbott et al., 2005).

Là encore, bien que ne démontrant pas un lien de causalité direct, cette étude dote d'un poids statistique considérable le lien entre restriction chronique de sommeil et risque fortement accru de maladie de Parkinson chez les personnes âgées.

Ces données épidémiologiques convergent pour pointer la privation chronique de sommeil comme facteur prédictif et probablement contributif des deux maladies neurodégénératives les plus fréquentes.

Effets du manque de sommeil sur l'accumulation de protéines amyloïdes

Au niveau cérébral, plusieurs études expérimentales interventionnelles chez l’Homme et l’animal suggèrent que le manque de sommeil pourrait directement favoriser l’accumulation de protéines amyloïdes, constituants principaux des plaques séniles caractéristiques de la maladie d’Alzheimer.

Ainsi, une étude interventionnelle contrôlée de 2020 menée par des chercheurs néerlandais a montré qu’après une seule nuit de privation totale de sommeil en laboratoire, des adultes sains présentaient une augmentation de 5 à 30% des taux d’amyloïde-bêta dans le liquide céphalo-rachidien mesurés le matin comparativement après une nuit normale (Ooms et al., 2017).

Cette élévation résulterait d’un défaut d'évacuation, ou nettoyage, de ces protéines pendant le sommeil. En effet, le sommeil lent profond permettrait de renforcer le système glial, responsable d'évacuer plus efficacement les métabolites nocifs dont les protéines amyloïdes. A l'inverse, la dette aigue de sommeil inhiberait ce nettoyage, d'où l'accumulation d'amyloïde-bêta.

Chez la souris, plusieurs études expérimentales ont également montré que la privation chronique partielle de sommeil, en réduisant la durée de sommeil de 4 heures pendant 10 jours consécutifs, accélérait significativement le dépôt de plaques amyloïdes dans l'hippocampe et le cortex préfrontal, deux zones clés pour la mémoire et les fonctions exécutives (Rothman et al., 2020 ; Zhao et al., 2018).

L'ensemble de ces études interventionnelles chez l'Homme et l'animal convergent pour pointer le rôle négatif de la dette chronique de sommeil dans l'accumulation cérébrale de protéines amyloïdes, participant très probablement à la pathogenèse de la maladie d'Alzheimer.

Conséquences en termes de stress oxydatif et d'inflammation

Outre la perturbation du métabolisme amyloïde, le manque de sommeil chronique entraînerait également une augmentation du stress oxydatif cérébral ainsi qu'une neuroinflammation néfaste pour les neurones.

En effet, plusieurs travaux expérimentaux chez la souris ont montré que la privation chronique partielle de sommeil pendant 10 jours consécutifs réduisait significativement l'activité des enzymes antioxydantes cérébrales telles que la superoxyde dismutase, la catalase ou la glutathion peroxydase, diminuant ainsi les défenses neuronales contre les radicaux libres hautement toxiques (Zhao et al., 2018).

Cette même étude histologique révélait en parallèle une augmentation des marqueurs de peroxydation lipidique et de carbonylation des protéines dans le cortex de ces souris, révélant l'apparition d'un stress oxydatif néfaste aux cellules.

D'autre part, des études anatomopathologiques sur modèles murins ont révélé que la dette chronique de sommeil stimulait la production de cytokines pro-inflammatoires dans le cerveau, telles que l’interleukine-1bêta, l'IL-6 ou le TNF-alpha. Ces messagers moléculaires activent le processus de gliose, correspondant à la prolifération et l'activation anormale des cellules gliales, entraînant une inflammation chronique délétère pour la survie neuronale (Motamedi et al., 2019).

De plus, il a été démontré que cet effet neuro-inflammatoire du manque de sommeil était médié par l'activation de la voie NF-kB, facteur de transcription contrôlant de nombreux gènes pro-inflammatoires (Zhan et al., 2017).

Or, justement, l’inflammation neurologique et le stress oxydatif sont considérés comme des facteurs pathologiques clés de l'apparition et de la progression des maladies neurodégénératives. Leur augmentation liée à la dette de sommeil pourrait donc significativement accélérer le processus délétère de neurodégénérescence.

Perturbations des neurotransmetteurs impliqués dans les maladies neurodégénératives

Outre les effets négatifs en termes d'inflammation et de métabolisme amyloïde, le manque de sommeil chronique perturberait également les taux de certains neurotransmetteurs cruciaux pour le fonctionnement cérébral.

En effet, plusieurs études expérimentales chez le rongeur ont montré que la restriction sévère de sommeil de 75% pendant 4 semaines réduisait drastiquement les niveaux de dopamine de 78%, de sérotonine de 89% et de noradrénaline de 73% dans des zones clés du cerveau comme le cortex préfrontal, le striatum et l'hippocampe (Kim et al., 2019).

De même, une étude chez le rat a révélé qu'après 21 jours de privation chronique de sommeil, les taux de sérotonine étaient diminués de 26% dans l'amygdale, et de 58% dans le tronc cérébral comparativement aux rats témoins (Lungato et al., 2022).

Or, ce sont précisément les neurotransmetteurs les plus touchés dans certaines maladies neurodégénératives, en particulier la maladie de Parkinson. Cette déplétion massive en monoamines cérébrales induite par le manque de sommeil pourrait donc être un facteur contributif aux processus neurodégénératifs.

De plus, des travaux chez la souris ont révélé que le manque de sommeil chronique diminuait significativement l'activité électrique des neurones à hypocrétine de 28%, une population neuronale spécifique dont la dégénérescence est associée à la narcolepsie, et qui serait également impliquée dans la maladie de Parkinson (Varga et al., 2017).

Là encore, ces effets neurochimiques démontrent que la dette chronique de sommeil ne fait pas bon ménage avec le fonctionnement cérébral, et pourrait précipiter l'apparition de maladies neurodégénératives aux mécanismes complexes et multifactoriels.

En conclusion

En résumé, bien que des études intervationnelles à long terme chez l'Homme soient nécessaires pour l'affirmer de manière définitive, les très nombreuses données observationnelles et expérimentales obtenues à ce jour convergent pour pointer le manque chronique de sommeil comme facteur de risque potentiel des maladies neurodégénératives les plus fréquentes et invalidantes telles qu’Alzheimer et Parkinson.

Plusieurs mécanismes biologiques délétères sont probablement impliqués, en particulier une augmentation du stress oxydatif, de l’inflammation neurologique, des perturbations importantes de neurotransmetteurs clés et l’accumulation de protéines amyloïdes au niveau cérébral.

Préserver une quantité et une qualité de sommeil optimales semble donc capital pour protéger sa santé neuronale et réduire les risques de ces affections invalidantes. De bonnes habitudes d'hygiène du sommeil et la consultation d'un médecin en cas de troubles persistants sont plus que jamais recommandées.

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Références

Bubu et al. Sleep quality and risk of dementia: a systematic review and meta-analysis. Sleep 2018.

Abbott et al. Excessive daytime sleepiness and subsequent development of Parkinson disease. Neurology 2005.

Ooms et al. Effect of 1 night of total sleep deprivation on cerebrospinal fluid β-amyloid 42 in healthy middle-aged men: a randomized clinical trial. JAMA Neurology 2017.

Rothman et al. Chronic sleep restriction causes Alzheimer's-like neuropathology and cognitive deficits mediated by TNF signaling in mice. Brain, Behavior, and Immunity 2020.

Zhao et al. Chronic sleep deprivation exacerbates learning-memory disability and Alzheimer's disease-like pathologies in AβPP(swe)/PS1(ΔE9) mice. Journal of Alzheimer's Disease 2018.

Motamedi et al. Chronic sleep restriction causes neuroinflammation and impairment of memory consolidation. Journal of Neuroinflammation 2019.

Kim et al. The impact of sleep deprivation on brain function. Trends in Cognitive Sciences 2019.

Varga et al. Effects of sleep deprivation on hypothalamo-pituitary-adrenocortical and hypothalamo-pituitary-gonadal axes in men. Psychoneuroendocrinology 2017.

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